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La CoESS et le GES font entendre leur voix en Europe

À l'occasion de la Présidence française du Conseil de l'Union européenne, la Confédération européenne des services de sécurité (CoESS) et le Groupement français des entreprises de sécurité (GES) ont publié une déclaration commune afin de faire entendre leur voix, notamment dans le cadre du projet de loi européen sur l'intelligence artificielle (EU AI Act) et de la future directive sur la résilience des entités critiques (directive CER). Deux dossiers stratégiques pour le secteur de la sécurité privée, et plus globalement pour la sécurité en Europe.

C’est la Présidence française du Conseil de l'Union européenne (UE) qui sera chargée de mener les négociations au Conseil de l'UE sur des dossiers essentiels pour la sécurité, en particulier les propositions de la Commission européenne pour une loi sur l'Intelligence artificielle (IA) et pour une directive sur la résilience des entités critiques. C’est pourquoi la CoESS et le GES ont décidé de publier une déclaration commune.

Un secteur sous tension

Ce message conjoint éclaire notamment le contexte particulier dans lequel s’inscrivent ces deux dossiers. « La pandémie a joué un rôle d’accélérateur de changement dans notre secteur. Certaines entreprises ont beaucoup souffert, comme dans la sécurité aérienne, l'événementiel ou le transport de valeurs », souligne Alexander Frank, Head of EU Affairs de la CoESS. En parallèle, dans de nombreux pays, on a assisté à une demande croissante en matière de télésurveillance, d'intégration de nouvelles technologies ou de nouveaux services pour la mise en œuvre de mesures sanitaires. « Malgré cela, dans la plupart des pays, la perte d’activité n’a pu être compensée. La pénurie de main d'œuvre s'est accentuée, notamment dans la sécurité aérienne. »

Sensibiliser l’Europe aux enjeux des entreprises de sécurité privée

« Les institutions européennes ne sont pas toujours conscientes de l'importance de notre secteur ni de l'impact de leurs décisions sur celui-ci. La directive CER et la loi européenne sur l’IA sont essentielles pour les entreprises de sécurité privée qui protègent les infrastructures critiques et pour celles qui prévoient d'intégrer de plus en plus d'intelligence artificielle dans leurs services », souligne Alexander Frank. 

Ce qui est décidé à Bruxelles a en effet un impact majeur sur le terrain. « La directive sur la protection des infrastructures critiques sera transposée en droit français, par exemple, d’ici à deux ans. Nous demandons donc à la Présidence française du Conseil de l’UE d’accepter les amendements du Parlement européen », poursuit-il. C’est un reflet des demandes du secteur, qui propose notamment d’améliorer le contrôle de la qualité et de la conformité des services de sécurité privée protégeant les entités critiques.

Quant à la loi sur l'intelligence artificielle, le texte préparé à Bruxelles sera directement applicable dans chaque pays européen deux ans après son adoption. « Or la proposition actuelle ne reflète pas l’importance que l’IA pourrait avoir à l’avenir dans la sécurité publique et privée. La CoESS et le GES recommandent des amendements afin que la loi reflète mieux les réalités des processus de sécurité », explique-t-il.

Une reconnaissance qui doit se traduire dans les actions politiques

Pendant la pandémie, le secteur de la sécurité privée a été reconnu comme service essentiel dans la plupart des pays mais aussi par la Commission européenne. « Cette reconnaissance doit se traduire désormais dans des actions politiques à quatre niveaux : une réglementation sectorielle adaptée, des partenariats publics-privés efficaces, des pratiques de marchés publics qui favorisent le mieux-disant et une législation de la sécurité publique tournée vers l’avenir », poursuit Alexander Frank.

Des synergies indispensables avec les entreprises de sécurité privée

Dans cette optique, la CoESS et le GES appellent la Présidence française à suivre les conclusions du Conseil de l’EU qui « reconnaissent l'importance des nouvelles technologies dans la protection des espaces publics et conseillent aux États membres de créer des synergies avec les parties prenantes, et notamment les entreprises de sécurité privée », conclut Alexander Frank.

3 questions à Cédric Paulin, secrétaire général du Groupement des entreprises de sécurité (GES)

Vous avez travaillé main dans la main avec la CoESS pour rédiger cette déclaration commune. Quel rôle a joué plus précisément le GES auprès de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne ?

Cédric Paulin : Nous avons pu faire le lien avec certains représentants de la Présidence française du Conseil de l’Union européenne avec lesquels nous étions en contact. Nous sommes venus en soutien afin d’analyser avec la CoESS la position de la Présidence française concernant la sécurité, les moyens d’action, les échéances de la directive CER et du règlement sur l’IA. Il fallait savoir ce qui était prioritaire pour la Présidence française, ses marges de manœuvre, l’état des discussions avec les autres États et avec les autres institutions (Parlement et Commission, le fameux Trilogue). Tout cela est complexe à appréhender. Mais il ne faut surtout pas oublier que la Présidence française n’est nullement là pour favoriser des positions spécifiquement françaises, mais bien pour faire avancer des projets européens.

Quels sont, pour vous, les amendements majeurs qui doivent être apportés à la directive CER et au projet de loi européen sur l’IA ?

C.P. : Nous avons suivi les recommandations de la CoESS qui est chargée du suivi de ces dossiers européens. Sur la directive CER, deux amendements nous semblent essentiels. Le premier propose un nouvel article 13a introduisant la pertinence des normes afin de favoriser l’utilisation de normes et de spécifications pertinentes pour la sécurité et la résilience des entités critiques. Pour le second, il s’agit de modifications de l'article 11.1.e introduisant des dispositions relatives au contrôle de la qualité des sociétés de sécurité privée. L’objectif est de définir les catégories de personnel exerçant des fonctions critiques, avec des exigences de formation et des qualifications appropriées, des droits d'accès aux zones, installations et autres infrastructures sensibles, ainsi qu'aux informations sensibles, y compris pour les prestataires externes, notamment en sécurité. En France, nous sommes précurseurs puisqu’une certification « assurer la protection de sites sensibles » a été mise en place par la CPNEFP* de notre branche, auprès de France Compétences.

Concernant le projet de loi sur l’IA, quatre amendements sont à retenir. Sur la sécurité juridique, il s’agit de faire la différenciation entre l'identification biométrique à distance et la vérification/authentification mais aussi d’établir une frontière claire entre la responsabilité des fournisseurs et celle des utilisateurs. Nous soutenons également la CoESS qui vise à mettre en place des garanties plus fortes contre l'utilisation abusive des systèmes d'identification biométrique à distance en temps réel dans les espaces publics. Il nous semble aussi indispensable de mettre en place un cadre de licence obligatoire pour tout agent de sécurité souhaitant exploiter cette technologie. Enfin, notre déclaration commune propose de permettre l'utilisation de la technologie dans les infrastructures critiques.

Au-delà de ces amendements, nous avons aussi proposé de tirer profit des échanges qui se sont développés entre organisations professionnelles via la CoESS. Ces deux dernières années ont ainsi permis de mettre en valeur l’utilité d’échanger entre les organisations en Europe : la CoESS a réalisé des sondages flash pour savoir comment sont effectués les contrôles de température, des pass sanitaires, etc. Aujourd’hui, nous envisageons de demander à la CoESS de regarder comment les entreprises de sécurité privée gèrent la pénurie d’effectifs, notamment dans le domaine événementiel.

Avec la guerre en Ukraine, quels seraient, selon vous, les enjeux d’un « continuum de sécurité » à l’échelle européenne, notamment pour les infrastructures critiques ?

C.P. : À l’échelle européenne, il importe de garantir qu’un incident se produisant sur une infrastructure critique ne se propage pas dans d’autres pays, ou que les mesures de sécurité soient suffisantes à l’échelle même de l’Union européenne ainsi que des pays voisins. Il faut viser l’homogénéité des mesures de sécurité : il ne sert à rien d’avoir une très bonne protection des infrastructures critiques dans un pays et, en même temps, une protection insuffisante dans un autre.

* CPNEFP : Commission paritaire nationale emploi et formation professionnelle

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